La Psychiatrisation des dissidences

Jean-Henri d’Avirac, essayiste

♩ AprĂšs l’excommunication, le SystĂšme s’engage dans l’isolement (au sens psychiatrique du terme) du dissident, comme en tĂ©moigne cette rĂ©action de la revue Challenge Ă  l’interview qu’osa donner Onfray au magazine des idĂ©es ElĂ©ments pour la civilisation europĂ©enne :

« La pensĂ©e Onfray n’est plus que la manifestation permanente des rĂ©pulsions d’un intellectuel dont le surmoi s’efface dĂšs qu’il est confrontĂ© Ă  des figures archaĂŻques paternelles ou maternelles toutes-puissantes avec lesquelles les conflits n’ont pas Ă©tĂ© rĂ©solus. Â»â€Š On se pince
 Jean Henri d’Avirac fait pour PolĂ©mia le point sur cette nouvelle dĂ©rive sectaire.

De la diabolisation Ă  la psychiatrisation

Disqualifier l’adversaire est dĂ©sormais la pratique la plus courante d’un SystĂšme qui n’a plus grand-chose d’autre Ă  nous dire et pour lequel toute idĂ©e est par dĂ©finition suspecte, suspecte d’intentions malĂ©fiques, de subversion ou, plus rĂ©cemment, de perte pathologique du sens du rĂ©el
 Ce rĂ©el se rĂ©sume Ă  prĂ©sent dans l’Axe du Bien Ă  l’Axe des Biens, au « systĂšme des biens (de consommation) Â», sous le vernis clinquant d’un humanisme Ă  deux balles, dont le citoyen est sommĂ© de ne pas se dĂ©tourner sous peine d’exclusion et d’ Â« isolement Â», au sens clinique du terme.

La diabolisation, bien connue de ses victimes que sont notamment les intellectuels non conformes, est la maniĂšre la plus radicale d’exclure du dĂ©bat l’adversaire : on ne discute pas avec le Diable, on l’excommunie ! Plus sournoise, plus visqueuse est la psychiatrisation. Tout aussi efficace, elle invalide l’adversaire qui, de naissance ou dans le prolongement d’une frustration et d’une dĂ©rive personnelle, semblerait ne plus ĂȘtre en capacitĂ© de prendre part au dĂ©bat. DiagnostiquĂ©, isolĂ©, stĂ©rilisĂ©, le malade doit ĂȘtre traitĂ© afin d’éviter que ne se propage sa folie, perçue gĂ©nĂ©ralement comme virale et violente. Sur un plateau tĂ©lĂ©, la rĂ©volte, suscitĂ©e jusqu’alors par un dĂ©ballage politiquement incorrect, laisse la place Ă  une psychanalyse en live de l’émetteur, qui en quelques fractions de seconde se retrouve sur un divan sous le regard condescendant d’observateurs partagĂ©s entre crainte et commisĂ©ration.

La machine à interner l’opposant

La juxtaposition d’exemples rĂ©cents de psychiatrisation suffit Ă  illustrer le propos.

FĂ©vrier 2015, le quotidien USA Today publie un rapport, curieusement issu du Pentagone, dans une pĂ©riode oĂč la Russie de Vladimir Poutine prĂ©sente, dans l’affaire ukrainienne, des signes flagrants de non-soumission Ă  l’ordre mondial amĂ©ricano-centrĂ©. Au cƓur du texte (rĂ©vĂ©lĂ© 7 ans aprĂšs sa rĂ©daction), Poutine serait atteint d’une forme d’autisme, le syndrome d’Asperger, que Brenda Connors de l’Ecole de guerre de la Marine amĂ©ricaine, auteur du rapport, considĂšre comme « un sĂ©rieux problĂšme de comportement affectant toutes ses dĂ©cisions Â» (
), cette information ne pouvant ĂȘtre confirmĂ©e que par un scanner du cerveau poutinien n’a pas suscitĂ© de nouveaux commentaires
 mais, elle court, elle court, la rumeur.

Les AmĂ©ricains sont depuis toujours experts en psychiatrisation des dissidences face Ă  ce qu’ils identifient comme des menaces pesant sur le grand supermarchĂ© planĂ©taire. De Mac Carthy aux libĂ©raux bon teint, le communisme a eu son lot : pour Störmer, « Le communisme est une maladie de l’esprit Â». Pour Ronald Reagan : « Ni un systĂšme Ă©conomique, ni un systĂšme politique, c’est une forme de folie, une aberration temporaire qui disparaĂźtra un jour de la surface de la terre parce qu’elle est contraire Ă  la nature humaine Â».

Plus rĂ©cemment et de façon larvĂ©e c’est la rĂ©sistance Ă  la consommation qui est indirectement visĂ©e. En termes macro-Ă©conomiques est scrutĂ© en permanence le « moral des mĂ©nages Â» sous forme de baromĂštre largement diffusĂ© dans lequel au bout du compte la non-consommation est devenue un marqueur de dĂ©pression collective.

Le partisan de la dĂ©croissance qui remettrait en question le chemin sacrĂ© de la consommation flairant le mur qui vient est pour sa part prĂ©sentĂ© par les porte-paroles/experts du SystĂšme, au mieux, comme un doux rĂȘveur, mais, plus gĂ©nĂ©ralement, comme un profil profondĂ©ment inadaptĂ©, consophobe, marginal, non frĂ©quentable sur les plateaux les plus en vue du PAF
 Il est vrai qu’entre deux Ă©crans publicitaires ça ferait carrĂ©ment dĂ©sordre !


D’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, relevons toute la pertinence de l’analyse de Jean-Pierre Legoff (1) (Du gauchisme culturel et de ses avatars) qui pointe du doigt une vĂ©ritable dĂ©rive : la psychiatrisation du peuple dans laquelle un inconscient collectif (au sens de Jung) nourri de « prĂ©jugĂ©s, de stĂ©rĂ©otypes ancrĂ©s Â» doit ĂȘtre combattu : vous ne savez pas que vous ĂȘtes malade, mais vous l’ĂȘtes, nous dit-on ! Tous les hommes potentiellement en proie Ă  leurs pulsions et Ă  leur inconscient devraient ĂȘtre ainsi soignĂ©s, rééduquĂ©s
 « Pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font Â»â€Š

Sur un tout autre registre, plus anecdotique mais trĂšs Ă©vocateur, furent les procĂšs rĂ©currents faits Ă  Eric Zemmour sur ses prĂ©tendues « obsessions Â» et ses dĂ©lires mĂ©diatiques qui feront de l’auteur du Suicide français, pointant du doigt la dĂ©virilisation de la sociĂ©tĂ©, « un homme qui doit avoir des problĂšmes avec les femmes Â»â€Š Tout aussi Ă©clairants sont ces propos de l’ Â« expert Â» alias Jean-Pierre Winter, psychanalyste, diagnostiquant Ă  l’invitation du magazine Le Point en avril dernier « un fantasme incestueux et une pulsion de mort Â» dans la famille Le Pen, qui expliquerait le dĂ©chirement en cours. CarrĂ©ment sidĂ©rant, le chemin de croix de ce jeune Ă©colo-anarchiste, qui avait eu l’outrecuidance, le 26 mars 2012, de s’élever contre le dĂ©classement de l’unique zone Natura 2000 de Loupian dans l’HĂ©rault en s’enchaĂźnant Ă  un puits et qui, Ă  l’appel du parquet, sur la base de la loi du 5 juillet 2011 permettant la psychiatrisation « des troubles Ă  l’ordre public Â», se retrouva Ă  l’isolement Ă  l’HĂŽpital de La ColombiĂšre Ă  Montpellier.

Que dire enfin de ces quelques ouvrages bien pensants (2), qui tentent de prĂ©senter les idĂ©es nationalistes ou identitaires comme l’expression d’une homosexualitĂ© refoulĂ©e ? Jusqu’à ce papier de Catherine David traitant de toutes les dissidences politiques et religieuses dans le Nouvel Observateur (septembre 2010), qui opĂšre une prĂ©tendue « psychanalyse des fanatiques Â» : « La montĂ©e aux extrĂȘmes est une nĂ©vrose masculine, une tragĂ©die phallique, une maladie de la virilitĂ© Â» ; ce serait lĂ  l’origine de la ligne de fracture « entre extrĂ©mistes et modĂ©rĂ©s de toutes obĂ©diences et de tous les pays Â» (
).

En filigrane dans ce patchwork se profilent les contours d’un nouveau bouclier destinĂ© Ă  la prĂ©servation du SystĂšme, qui met la pensĂ©e sous prĂ©servatif et sous monitoring. Pour votre bien, la NSA et notre propre police (dĂ©sormais dĂ©complexĂ©e sur le renseignement et la surveillance gĂ©nĂ©ralisĂ©e) veillent au grain. Pour votre bien, la police de la pensĂ©e et SOS MĂ©decins du Cerveau rĂ©pondent en temps rĂ©el sur les dĂ©rives non conformes
 Pourquoi redouter un Ă©lectro-encĂ©phalogramme au diagnostic rĂ©putĂ© fiable quand on a la possibilitĂ© d’ĂȘtre protĂ©gĂ© et soignĂ© ?
 « Pourquoi redouter les Ă©coutes quand on n’a rien Ă  se reprocher ? Â» (BenoĂźt Hamon)
 La CorĂ©e du Nord n’est plus trĂšs loin !

RĂ©manence d’un parfum nazi et soviĂ©tique : la psychiatrie punitive

Les partis dits « de gouvernement Â» s’accordent pour condamner les idĂ©ologies perçues comme doctrinaires, vĂ©hiculant une pensĂ©e irrĂ©elle, dangereuse, pathologique, dont il serait urgent de guĂ©rir. Le prĂ©tendu irrĂ©alisme des idĂ©ologues est une maniĂšre de dĂ©truire une pensĂ©e concurrente, qui rappelle furieusement le rĂ©flexe
 idĂ©ologique : « L’idĂ©ologie est toujours l’idĂ©e de l’autre Â» (Raymond Aron) et, comme le dit François-Bernard Huyghe : « L’idĂ©ologie est souvent une pensĂ©e contre (
). Les idĂ©ologues se reconnaissent souvent Ă  leur obsession de prouver combien leur discours est non idĂ©ologique Â». L’idĂ©ologie n’est certes pas « l’idĂ©ocratie Â» (3) oĂč seules les reprĂ©sentations commandent la pratique politique et en vĂ©ritĂ©, au-delĂ  de l’idĂ©ologie, Ă©pouvantail bien pratique, c’est bien la pensĂ©e que le politique au pouvoir est trĂšs souvent tentĂ© de liquider.

Le IIIe Reich, avec son Aktion T4 destinĂ© aux malades mentaux ou prĂ©tendus tels, prĂ©sente une Ă©pouvantable illustration de ce que la psychiatrie peut faire lorsqu’elle se met au service d’un pouvoir totalitaire. Mais s’agissant de la psychiatrisation de la dissidence idĂ©ologique, c’est en URSS que nous observerons sa forme la plus aboutie.

Entre 1935 et 1974, le nombre de lits dans les hĂŽpitaux psychiatriques russes passera de 34.000 Ă  390.000. Les dissidents y Ă©taient enfermĂ©s sous le diagnostic de schizophrĂ©nie torpide, lente, latente, stagnante ou larvĂ©e en vertu de l’article 58B du code de rĂ©fĂ©rence. Andrei Snezhnevsky proposa l’élargissement des critĂšres d’évaluation des paranoĂŻas ou des schizophrĂ©nies latentes permettant clairement de reconnaĂźtre comme malades mentales des personnes en bonne santĂ©, mais au comportement non conformiste, symptĂŽme « de grave dĂ©labrement psychologique Â» pouvant conduire le malade Ă  commettre un acte criminel.

Sans vouloir faire un parallĂšle hasardeux, il est saisissant de lire de nos jours, sous la plume d’éminents psychiatres occidentaux, Ă  des annĂ©es lumiĂšres de la psychiatrie punitive, des articles sur le « syndrome borderline Â», Ă©tat limite dĂ©crit dans l’American Psychiatric Press comme « une difficultĂ© Ă  faire confiance Ă  autrui et un questionnement sur l’identité  Â». La machine psychiatrique aux Etats-Unis, au travers notamment du DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) semble avoir le pouvoir d’aiguiller dĂšs sa 4e version (1994-2000) la quasi-totalitĂ© des AmĂ©ricains vers l’asile. Sont dĂ©sormais potentiellement estampillables « troubles du cerveau Â» : « Les crises existentielles et transition de vie ; les crises spirituelles ; le refus de l’argent ; l’impact d’une oppression sociale ou des diffĂ©rences culturelles
 Â» (4).

« La Raison, c’est la folie du plus fort Â», disait Nietzsche, et tout cela, fort du crĂ©dit de l’autoritĂ© scientifique, contamine en profondeur administrations, assurances, mĂ©dias, recruteurs, scientifiques jusqu’aux mĂ©decins eux-mĂȘmes qui finissent par y croire. Il s’agit bien de marquer au fer rouge ceux que l’on souhaite dĂ©marquer socialement, dĂ©finitivement. Voici donc venu le rĂšgne de la camisole dĂ©sormais Ă  la portĂ©e de tous !

L’ensemble de ces dĂ©rives ne serait pas si grave si notre mĂ©decine occidentale en rabattait sur ses prĂ©tentions scientifiques, iatro-mĂ©canistes, ultra-rationalistes, en assumant Ă  la maniĂšre des mĂ©decines traditionnelles orientales le statut de science humaine, Ă©rudite, humble, holistique, laissant par dĂ©finition plus de place Ă  l’environnement, Ă  l’histoire, au doute et au dĂ©bat.

Traiter la dissidence : Quand les malades deviennent thĂ©rapeutes

« Plus la gauche rĂ©elle est malade, plus elle invoque la gauche idĂ©ale Â», rĂ©sume Edgar Morin. Cette gauche morale, dĂ©goulinante de bons sentiments, qui commĂ©more obsessionnellement, qui dĂ©nonce hystĂ©riquement, voudrait occuper la place du psy aprĂšs avoir occupĂ© celle du juge : « DĂ©pouillĂ©e de toute Ă©nergie politique, la gauche est devenue une pure juridiction morale, incarnation des valeurs universelles, championne du rĂšgne de la vertu et tenanciĂšre des valeurs musĂ©ales du Bien et du Vrai, juridiction qui peut demander des comptes Ă  tout le monde sans en rendre Ă  personne Â», nous disait dĂ©jĂ  en 1997 dans LibĂ© un homme de gauche, Jean Baudrillard, clairvoyant sociologue, dĂ©cortiqueur du SystĂšme. Rejointe par la droite « rĂ©publicaine Â», cette « juridiction Â» dĂ©cide Ă  prĂ©sent du normal et de l’anormal, prĂ©tend incarner la loi naturelle, dĂ©finit le « borderline Â» et interne l’opposant, son exclusion de la scĂšne intellectuelle (ou de ce qu’il en reste) et de la scĂšne mĂ©diatique Ă©tant motivĂ©e par de regrettables dĂ©faillances qualifiĂ©es tour Ă  tour de dĂ©rapages, de psychorigiditĂ©, de folie, d’obsession, de paranoĂŻa, de schizophrĂ©nie, de dĂ©connection du rĂ©el ou de phobie. Sur ce tout dernier point et Ă  titre d’exemple, il est pour le moins singulier de voir la « xĂ©no-vigilance, au demeurant assez naturelle chez tout ĂȘtre dĂ©tenteur d’un peu d’instinct de survie, assimilĂ©e systĂ©matiquement Ă  la xĂ©nophobie, donc de facto psychiatrisĂ©e par des xĂ©nophiles, qui dans leur oubli du proche, leur absence de questionnement sur l’intention rĂ©elle des nouveaux venus et de leur nombre constituent une espĂšce unique totalement dĂ©connectĂ©e du rĂ©el : le bobo hors sol. L’accusation de racisme, parce qu’elle renvoyait Ă  la thĂ©orie raciale et Ă  l’horreur nazie, c’est-Ă -dire au Mal absolu, diabolisait. L’accusation de xĂ©nophobie psychiatrise et constitue l’un des grands marqueurs de cette Ă©volution. Sur le mĂȘme logiciel, tout questionnement sur le prosĂ©lytisme homosexuel sera immĂ©diatement qualifiĂ© d’homophobie, toute interrogation Ă©mise sur la compatibilitĂ© entre la charia et la RĂ©publique sera immĂ©diatement diagnostiquĂ©e islamophobe
 La liste serait bien longue mais, lĂ  encore, les accusateurs, biophobes/anthropophobes pur beurre sont, eux, porteurs d’une dĂ©viance caractĂ©risĂ©e, vĂ©ritable allergie Ă  ce qui structure un ĂȘtre vivant. Ils ont Ă©tĂ© nourris au lait glauque de cette gauche dont Michel Onfray nous dit « qu’elle ne s’occupe plus des masses pour s’occuper des marges Â», Ă©rigeant en rĂ©fĂ©rent universel l’anecdotique, le singulier, le hors-norme jusqu’à flirter avec le dĂ©viant.

Surexcitation permanente, addictions multiples, hystĂ©rie, biophobie, grĂ©garisme, nombrilisme, autisme collectif, irrĂ©alisme et moralisme pathologique
 tous ces maux dont souffrent nos supposĂ©s thĂ©rapeutes fragilisent considĂ©rablement la qualitĂ© de leur diagnostic. La rĂ©vĂ©lation d’un monde contre nature, inĂ©vitablement gĂ©nĂ©ratrice d’angoisses, n’a pas Ă  ĂȘtre psychiatrisĂ©e dans le seul but de tuer dans l’Ɠuf l’expression d’une vision du monde alternative. Une Ă©litocratie politico-intellectuelle, qui flirte avec une pseudoscience programmĂ©e pour normaliser les comportements puis organiser la rĂ©pression, prĂ©figure « un monde confuso-onirique » oĂč le passage par la salle de shoot sera obligatoire. Oui, il n’y a pas Ă  en douter, docteur, aprĂšs notre lobotomie, nous vous aimerions davantage, mais voilĂ , votre monde n’est pas et ne sera jamais le nĂŽtre. Nous revendiquons haut et fort notre dissidence et proclamons avec Erasme que « C’est bien la pire folie que de vouloir ĂȘtre sage dans un monde de fous » !

Source

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icÎne pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte WordPress.com. DĂ©connexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte Facebook. DĂ©connexion /  Changer )

Connexion Ă  %s

%d blogueurs aiment cette page :